La durée du bail dérogatoire (statut des baux commerciaux)
La Cour de cassation vient préciser les contours du bail dérogatoire prévu à l'article L. 145-5 du code de commerce (pourvoi n°11-19.634).
L'article précité dispose en ses deux premiers alinéa que " les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à deux ans. Si à l'expiration de cette durée le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre."
Dans le cas d'espèce, un bail dérogatoire avait été consenti à compter du 1er septembre 2003 pour se terminer le 30 juin 2005. Après avoir délivré congé à la locataire, celle-ci est restée dans les lieux et a fait assigner son bailleur pour bénéficier d'un bail soumis au statut des baux commerciaux après l'échec des négociations.
Pour accueillir cette demande, l'arrêt de la Cour d'Appel retient qu'il s'est écoulé plus de 20 mois entre la fin des pourparlers et la date à laquelle le bailleur a été assigné par le locataire et que cette inaction doit être considérée comme constitutive d'un accord tacite du bailleur sur le maintien dans les lieux de la locataire.
La juridiction suprême casse la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour violation des dispositions de l'article L.145-5 alors que cette dernière avait constaté que le bailleur avait, avant le terme du bail, délivré congé à la locataire et que la renonciation à un droit ne se déduit pas de la seule inaction ou du silence de son titulaire.
Cette analyse est heureuse et complète d'ailleurs la précédente, aux termes de laquelle il avait été jugé qu'il appartenait au bailleur de manifester, avant la date contractuelle d'expiration du bail, sa volonté de ne pas poursuivre sa relation contractuelle avec le locataire, la charge de la preuve de cette manifestation de la preuve lui incombant (Cass. Civ. 4 mai 2010 pourvoi n°09-11.840).
Entériner la position de la Cour d'appel, aurait sinon contraint le bailleur à faire délivrer congé au preneur en fin de bail, puis, à défaut de départ volontaire, à l'assigner pour le contraindre à déguerpir aussitôt, sous peine de voir appliquer le statut des baux commerciaux. L'effet de congé donné par le bailleur aurait été ainsi complètement dénié.
Par Maître Alexis Devauchelle, avocat
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